En Guinée, les chiffres prennent de l’avance sur les solutions dans la gestion de la crise sanitaire covid-19. Les jours se comptent au même titre que le nombre de contaminés de façon exponentielle. Á date, nouvelle preuve, s’il en fallait une, que le pays fonce droit dans le mur avec une issue incertaine. Mais comment en est-on arrivé à cette situation ? Existe-t-il une solution pour nous tirer d’affaire ? Si oui, à quel prix ?

Le premier cas d’infection par le nouveau coronavirus a été détecté en Guinée, sur une Belge, le 13 Mars 2020. Un mois et demi après, le pays compte 1650 cas officiels. Face à la gravité de la situation, il est en effet difficile de comprendre ou encore moins d’expliquer la morosité des autorités en charge de la riposte 5 ans après le passage de l’épidémie d’Ebola. Ainsi, pour apporter sa pierre à la compréhension, nous allons intervenir sur 4 aspects de la situation.

Le laxisme du gouvernement

En prenant des mesures restrictives très tardivement après la confirmation du premier cas de coronavirus sur son territoire et en communiquant ensuite maladroitement, la Guinée a su ouvrir, au grand désarroi de sa population, la voie royale à la propagation du virus. Les autorités guinéennes ont carrément sous-estimé la vitesse à laquelle la situation du coronavirus pouvait se compliquer.

Les premières mesures pour freiner la propagation du virus ont été basées sur des actions mécaniques, non coordonnées et passives. Ainsi, dans le souci de mieux cerner la propagation du virus, le gouvernement a fait fermer les frontières aériennes, terrestres et maritimes. De ce même pas, il a fermé les établissements scolaires et universitaires, les boîtes de nuit, les lieux de culte ainsi que l’interdiction de regroupement et de manifestation.

Dans ce contexte de crise sanitaire prévisible, le gouvernement guinéen a pêché par son entêtement à vouloir coute que coute tenir les élections législatives.

Des errements qui ont fait l’objet de vives critiques de la part de bon nombre d’observateur, qui ont estimé que la tenue de ce scrutin ne servait qu’à nourrir l’agenda caché du pouvoir en place.

Guerre de leadership : Une bataille pour le contrôle des manœuvres ?

Comme si la situation n’était déjà pas assez grave pour se le permettre, le ministère de la santé, département sectoriel de tutelle et sa division de l’agence nationale de sécurité sanitaire (ANSS) se livre une véritable bataille pour le contrôle des manœuvres de riposte face à la menace pressante et pesante du coronavirus. Avec un flot d’actions controversées qui en découle : pas de collaboration sur le terrain, l’entêtement des uns et des autres à se mettre d’accord sur une même stratégie, une guerre d’égo. Dans ce méli-mélo où chacun voit midi à sa porte, les victimes collatérales restent cependant les malades qui alitent sous le coup de la douleur de la maladie. Triste sort pour ces condamnés du système.

L’administration étant en principe caractérisée par une forte hiérarchie, la nôtre nous étale des pratiques antidatées entretenues notamment par le président de république qui brille par sa partialité. Bien sûr, il faut rassurer en gestion de crise, mais il faut aussi prendre des décisions. La crise en soi se caractérise par une complexité à gérer, tant de nombreuses parties prenantes sont concernées. Il est surtout complexe de trouver la juste dose de bonnes actions, de paroles, d’anticipations. En se disloquant ainsi au sein même de l’appareil d’Etat, le ministère de la santé et l’ANSS ont d’avantage compliqué une gestion efficace du virus.

‘’Une communication ratée… place aux rumeurs de mauvaise foi’’

Une crise se gère et les moyens de cette gestion sont classiques. Mais, les obstacles y sont nombreux et les erreurs sont rarement évitées. Justement cette erreur n’allons pas loin, fut la non anticipation du gouvernement à communiquer et surtout à bien communiquer pour préparer la mentalité du peuple à adhérer à sa politique de lutte sans avoir à utiliser les moyens coercitifs.

La. Guinée ne s’est pas investie dans une réelle sensibilisation de masse, accompagnée de sanctions dissuasives et largement diffusées sur les chaînes de télévision et de radio, dans la presse, sur les portails web officiels, sur les réseaux sociaux et à travers des actions de terrain. Comme s’il n’était pas ou peu nécessaire, le gouvernement est resté stoïque et spectateur d’une éventuelle crise sans faille. Même quand il a décidé de sortir de cette hibernation, sa communication n’a jamais semblé convaincre. Le peuple s’est donc remis à la merci des journalistes en qui il croit pour s’informer de la situation quitte à se livrer à des rumeurs de mauvaise foi qui ne cessent de fuser sur les réseaux sociaux notamment.

Il était donc question à ce niveau de communiquer calmement sur une situation incertaine et complexe tout en évitant justement la maladresse, les incertitudes et surtout l’affolement.

Des pistes de solutions, en existent-elles encore ?

L’immensité de la tâche qui nous attend ne doit pas nous rendre fataliste loin s’en faut, elle doit nous donner ce supplément d’âme pour nous affirmer en tant qu’État fort.

Les pistes de solution sont encore à notre portée tant qu’il est temps. Cela passera notamment par une rigueur sans détour à tous les niveaux. Ainsi pour commencer, il est plus que nécessaire d’isoler l’épicentre de la pandémie pour permettre effectivement une concentration de l’intervention étatique. À la suite de cet isolement, un investissement à la hauteur du problème sur des kits de dépistage massif est plus que d’utilité car il ne servira pas à grand-chose d’isoler sans tester. Une diversification mais avec toujours les mêmes motivations des centres de traitement ne serait qu’un moindre mal. Pour les régions administratives du pays, il est nécessaire de mobiliser le personnel nécessaire et de réactiver les centres de traitement qu’on avait mis en place pendant que l’épidémie Ebola sévissait dans notre pays. Ces centres permettront une non évacuation des malades sur Conakry. L’apport des initiatives citoyennes pourraient aussi aider à sensibiliser la population sur la nécessité de briser la chaîne de contamination du virus. Et oui on l’aura bien compris, seule une action coordonnée de toutes les forces vives de la nation nous permettra d’endiguer le virus hors de nos frontières.

La pandémie du coronavirus a remis les failles du système sanitaire, économique et social de l’Etat guinéen au goût du jour. Elle a montré combien notre État est fragile.

Ouessou Diaby

Actujeune.com